5 décembre

La fête du passage de l’équateur a eu le mérite de nous avoir tous liés d’une nouvelle manière. Nous avons chanté, dansé et rigolé lors d’une soirée de festivités où chacun avait mis de côté son titre de scientifique, de chef, d’officier, d’étudiant, et sans obligation, nous avons profité du temps libre ensemble.

Le lendemain nous laisse tous un peu ralentis, mais tellement plus soudés. La connexion avec l’équipage russe s’est encore une fois approfondie. La cérémonie et le nombre de sourires qui ont été échangés ont changé l’ambiance du bateau. Maintenant, tout le monde connaît les bases de russe pour se saluer et chaque fois qu’on se croise dans les coursives, les éclats de rire fusent, les yeux pétillent, et les mains se claquent dans un contentement fraternel.

Nous sommes à notre 18ème jour de traversée de l’Atlantique; nous passons au large du bassin de Guinée. La mer est si belle, majestueuse. Elle nous enlace et nous ballotte dans un roulis qui s’est fait presque discret.

Aujourd’hui, les étudiants sont mobilisés autour d’une discussion sur les changements climatiques. Huit angles, et autant de groupes, ont été prédéterminés. Chacun des groupes présente une réflexion sur l’accord international de la COP21 pour la limitation du réchauffement à 2°C, le rôle des médias, la relation entre la science, la politique et l’économie, ou encore la place de l’éducation pour n’en citer que quelques-uns. L’assemblée et ses réactions sont fascinantes, inspirantes pour beaucoup puisque chaque personne amène l’expertise de son pays. Nous avons la chance d’avoir, autour de la table, les personnes les plus renseignées sur les constats et les solutions mises en place. Celles apportées par certains gouvernements sont discutées, tout autant que la position des scientifiques dans ce débat.

La nécessité de garantir la crédibilité scientifique par la fiabilité des raisonnements et observations fait l’unanimité, tout autant que la nécessité de mieux communiquer. Nous revenons très régulièrement sur la communication scientifique et le champ des possibles. Comment communiquer ce que les scientifiques relèvent chaque jour? Comment entrer en partenariat avec les médias et arriver à créer des plateformes d’informations originales et puissantes qui puissent ré-attirer l’attention du grand public et intéresser les plus sceptiques ? Les idées fusent, chacun prend des notes. Les volontés de s’organiser ensemble, de collaborer sont discutées et solidifiées un peu plus à chaque heure. Quelques semaines sur un bateau sont comme des années passées à terre, et nous sentons tous la rapidité et la force des échanges qui sont en train de se faire sur ce navire.

Séance de travail et d'échange de connaissances sur le pont. ©V.Sentilhes
Séance de travail et d’échange de connaissances sur le pont. ©V.Sentilhes

——————————–

6 -7 décembre

Les méthodes de communication sont toujours au cœur des échanges. Le focus se fait aujourd’hui sur le phénomène El Nino et ses impacts sur la météorologie et la pêche à l’échelle mondiale. L’année qui se termine aura été marquée par les variations d’El Nino, qui auront participer à d’extrêmes sécheresses dans le sud de l’Afrique, à des pluies torrentielles dans le nord-ouest de l’Amérique et à un réchauffement significatif de la température moyenne des océans, une température encore jamais enregistrée auparavant. Les dynamiques atmosphériques et océaniques complexes mises en jeu dans ces transformations deviennent les axes principaux des articles commandés aux étudiants. Comment intéresser les journalistes et le public? Comment raconter tout cela autrement? La discussion du changement climatique au niveau mondial rencontre déni et lassitude. La nécessité d’innover en créant des ponts entre les scientifiques et le public est grande, et cela passe par la création de projets multiplateformes avec le soutien de grands médias établis.

L’hémisphère Sud nous réussit bien et même si le vent souffle encore fort, la mer est restée accueillante et nous permet d’effectuer nos arrêts journaliers. Notre routine de prélèvement – qui comprend deux arrêts pour l’immersion de la CTD et la mise à l’eau des filets Neuston et Bongo…

Les russes Mikael, responsable scientifique, et Iurii, ingénieur, lançant le filet Neuton pour le projet de Giuseppe Suaria d'observation des micro-plastiques.
Les russes Mikael, responsable scientifique, et Iurii, ingénieur, lançant le filet Neuston pour le projet de Giuseppe Suaria d’observation des micro-plastiques. ©V.Sentilhes
Prélèvements avec le filet Bongo. ©V.Sentilhes
Prélèvements avec les filets Bongo. ©V.Sentilhes
Ivo Beck et Giuseppe Suaria observant du plancton attrapé avec le filet neuton. ©V.Sentilhes
Ivo Beck et Giuseppe Suaria observant du plancton attrapé avec le filet Neuston. ©V.Sentilhes
Une "galère portuguaise", sorte de siphonophore marin extrêmement urticante a également été prise dans les filets... ©V.Sentilhes
Une “galère portuguaise”, Physalia physalis, un siphonophore marin extrêmement urticant, a également été prise dans les filets… ©V.Sentilhes
Siphonophore ©Chroniques du plancton www.planktonchronicles.org